Back to top
Intro donation

Contribuer

à la recherche sur le cancer

Contribuer à la recherche sur le cancer :

Contribuer à la recherche sur le cancer :

Don ponctuel
Don mensuel
Punctual donation buttons
regular_donation
04 avril 2023

Les « blebs », comment les cellules organisent leur propre survie

Les conditions dans lesquelles évoluent les cellules cancéreuses, notamment lorsqu’elles quittent la tumeur pour coloniser d’autres organes, ne sont normalement pas vivables pour des cellules saines. Des travaux récents décryptent des mécanismes originaux expliquant la résilience des cellules cancéreuses « solitaires ».

Les cellules qui constituent nos tissus sont des « êtres sociaux » ! Leur activité, leur comportement et même leur survie dépendent des contacts qu’elles établissent avec leurs congénères et voisines. Littéralement : de nombreuses protéines enchâssées dans les membranes des cellules transmettent des informations sur la densité des cellules dans leur milieu, sur la disponibilité de nutriments, sur la rigidité de la matrice dans laquelle évoluent les cellules… Autant de signaux que chaque cellule intègre et qui agissent comme une stimulation – ou un frein – pour la survie de la cellule. Alors, quand une cellule perd ces contacts, ce sont en général de sombres signaux qui lui parviennent. Elle s’arrondit et il se déclenche en elle une cascade de réactions qui, invariablement, mènent à sa mort. Un suicide cellulaire au nom savant d’anoïkose (de la racine grecque « a », privatif et « oïkos », le quartier, le bourg, la maison, comme l’explique le dictionnaire de l’académie nationale de pharmacie).

Mais comment diable font les cellules cancéreuses qui perdent toutes leurs accroches, leurs repères et, donc, tous ces signaux normalement vitaux, lorsqu’elles quittent la tumeur primaire et colonisent d’autres organes ? Comment résistent-elles à cette anoïkose qui devrait, normalement se déclencher ? Un article récemment publié dans Nature indique qu’une partie de la réponse pourrait tenir en cinq lettres : blebs. Ces formations, décrites dans différents contextes par les biologistes, sont des sortes de bulles qui bourgeonnent à la surface des cellules. Les travaux des chercheurs américains se sont basés sur l’étude en microscopie 3D de cellules de mélanome caractérisées, entre autre, par la présence de mutations du gène NRAS, un oncogène bien connu. Leurs observations ont révélé que les blebs permettaient, par les replis de membrane qu’ils formaient, d’organiser la mise en action de la protéine NRAS activée par ses mutations. Selon leurs résultats, cette mise en action reposait, entre autre, sur le recrutement, au niveau de ces replis, de protéines sensibles à la courbure de la membrane et formant une sorte d’échafaudage servant à organiser le rapprochement de protéines interagissant les unes avec les autres. Un hub de communication qui semble, par certains aspects en tout cas, se substituer aux relations de voisinage qui permettent aux cellules saines de survivre.

Renforçant ces résultats, des expériences menées sur des cellules non cancéreuses ont montré que le fait de provoquer la formation de blebs induisait une résistance à l’anoïkose quand les cellules étaient décrochées de leur voisinage, alors même qu’elles ne portent pas de mutations oncogéniques comme celles du gène NRAS. Ces excroissances seraient ainsi suffisamment influentes pour opérer des changements en profondeur dans la biologie des cellules.
Dernier point, et non des moindres, les chercheurs se sont rendu compte que les blebs étaient une sortie de secours pour un autre type de cellules de mélanome que certaines thérapies ciblées (des inhibiteurs de BRAF ou de MEK) rendaient sensible à l’anoïkose.

Ces nouvelles données sont donc importantes, non seulement pour envisager des stratégies de prévention des métastases, mais aussi pour imaginer bloquer des mécanismes de résistances à des thérapies ciblées largement utilisées en cancérologie, en particulier contre les mélanomes.

 


R.D.

Source : Weems, A.D. et al; Blebs promote cell survival by assembling oncogenic signalling hubs; Nature, 1er mars 2023