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16 octobre 2014

Cancers du sein : les espoirs de la médecine personnalisée

Cinq ans après un diagnostic de cancer du sein, le taux de survie des patientes est supérieur à 85 %. Pourtant certaines tumeurs particulièrement agressives restent sans réponse thérapeutique efficace et les risques de récidive sont souvent importants. Des formes peu agressives sont quant à elles parfois traitées alors qu’une simple surveillance suffirait. La médecine personnalisée, qui s’appuie notamment sur une meilleure connaissance des tumeurs, constitue une voie d’amélioration importante pour la prise en charge de ces cancers.

En France, un diagnostic de cancer du sein a été posé chez un peu plus de 48 000 femmes en 2012, dont environ 17 000 dans le cadre du dépistage national organisé.

Ce dispositif de dépistage précoce pose la question de la capacité à prédire l’évolution de la maladie : la tumeur détectée va-t-elle évoluer rapidement ou non ? Nécessite-t-elle un traitement rapide et intensif ou une prise en charge a minima ? Les chercheurs, cliniciens et médecins s’attachent à développer des outils et des méthodes fiables pour adapter le traitement à chaque tumeur, chaque patiente, bref, pour personnaliser la prise en charge.

La personnalisation, une démarche déjà ancrée dans la pratique

Identifier les patients qui répondent à un traitement ou ceux qui, au contraire n’y trouvent pas suffisamment de bénéfice est l’un des fondements de la recherche clinique. Ces questions conditionnent la conception des essais cliniques qui visent à adapter au mieux les stratégies thérapeutiques.

La prise en charge des cancers du sein ne fait pas exception. D’années en années la description des tumeurs de chaque patiente s’est précisée : d’abord histologique (localisation, capacité à se disséminer), la description a gagné une dimension « biologique », fondée sur l’analyse des mécanismes qui permettent à la tumeur de croître. On sait par exemple identifier les cancers du sein dont la croissance dépend d’une stimulation hormonale. En termes de prise en charge, cela signifie que seuls ces cancers seront sensibles à des traitements basés sur l’hormonothérapie. Chez d’autres patientes, la multiplication des cellules tumorales dépend du signal transmis par HER2, le récepteur à un facteur de croissance, qu’elles expriment en grande quantité. Là encore, cette découverte a permis de mettre au point, dans les années 90, une des premières thérapies dites « ciblées », basée sur le blocage de ce récepteur grâce à un anticorps, le trastuzumab (Herceptin®).

Exploration de l’écosystème tumoral

La diversité des cancers du sein s’est peu à peu révélée dans sa grande complexité grâce à des explorations plus fines des tumeurs et grâce au progrès des techniques d’analyse moléculaire. Les tumeurs sont alors apparues comme un écosystème, un ensemble d’éléments qui interagissent les uns avec les autres : différents types de cellules tumorales, cellules voisines saines, cellules immunitaires, vaisseaux sanguins…

Le Professeur Roman Rouzier, de l’Institut Curie (Paris), coordonne l’un de ces projets d’exploration. « Nous sommes susceptibles de produire deux types d’informations, explique-t-il, certaines nous éclairent sur l’évolution de la maladie, son « histoire naturelle », d’autres nous dévoilent des mécanismes moléculaires impliqués dans la cancérisation ». Connaitre l’histoire naturelle aide à « prévoir » comment la tumeur peut évoluer, y compris en réaction aux traitements : aura-t-elle tendance à générer des métastases ? Restera-t-elle peu agressive ? La compréhension des mécanismes moléculaires, elle, permet d’identifier des cibles thérapeutiques, pour certaines déjà repérées dans des cancers de localisation différente.

Concrètement, cette équipe soutenue conjointement par la Fondation ARC, la Ligue nationale contre le cancer et l’INCa1, s’intéresse à l’hétérogénéité intratumorale. De quoi s’agit-il ? Si une tumeur est bien issue d’une seule cellule qui s’est multipliée sans contrôle, on sait que des descendantes de cette cellule originelle peuvent évoluer indépendamment et donc générer plusieurs types de cellules tumorales au sein d’une même tumeur. Les chercheurs veulent évaluer l’impact de cette hétérogénéité sur l’évolution de la tumeur et sur l’effet des traitements. Par exemple, au sein d’une tumeur, on peut trouver une minorité de cellules qui ne dépend pas de stimulation hormonale pour se multiplier. Si les autres, majoritaires, seront tuées par un traitement anti-hormonal, cette minorité y résistera et pourra être à l’origine de rechutes…

Haut débit

L’apport des techniques d’analyse moléculaire à haut débit a été décisif pour l’étude à grande échelle des caractéristiques des tumeurs : il est désormais possible d’établir le patrimoine génétique complet d’une tumeur, sa carte d’identité en quelque sorte, et de savoir précisément quels gènes elle exprime (trop ? pas assez ?). Possible, mais pas simple pour autant : « pour connaitre l’ensemble des gènes exprimés dans une tumeur, le dispositif coûte 500 euros, ce qui est peu, rappelle le Pr Rouzier, mais c’est le travail qu’un ingénieur doit réaliser pour interpréter ces dizaines de milliers de données brutes qui est important, d’autant plus si l’on veut réaliser une étude comparative avec beaucoup de patients ! » C’est en combinant toutes ces données que des liens peuvent être établis entre un profil génétique donné et le niveau d’agressivité de la tumeur, ou entre le degré d’hétérogénéité intratumorale et la résistance à un traitement …

Réalité de la recherche clinique

Adapter une stratégie thérapeutique sur la base des caractéristiques moléculaires tumorales de la patiente est une étape importante dans la personnalisation des traitements. Actuellement les traitements sont proposés en fonction de l’analyse de quelques bio-marqueurs. Ce sont désormais des dizaines, des centaines de ces bio-marqueurs que la connaissance de l’ « écosystème tumoral » permet d’envisager. Comment repérer ceux qui seront pertinents pour éclairer le médecin dans sa décision ? Pour le Pr Rouzier, « de l’analyse informatisée des données moléculaires jusqu’à la prise de décision thérapeutique il y a un continuum qu’il faut baliser ! ». Ces balises, ce sont les essais cliniques qui peuvent les poser. C’est la validité de l’approche même qu’il faut tout d’abord questionner : est-il bénéfique, pour les patients, d’administrer des traitements sur la base de données moléculaires ? Les essais Safir 1, Shiva, puis Safir 2 (en cours), par exemple, répondent à cette question et semble montrer que l’approche est prometteuse.

Enfin, l’équipe du Pr Rouzier a prévu d’évaluer l’impact que peuvent avoir les données moléculaires sur les stratégies thérapeutiques choisies lors des réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP), au cours desquelles se croisent les avis des différents professionnels. L’essai clinique confrontera les décisions prises avec ces informations nouvelles aux décisions qui auront été prises sans leur apport. L’enjeu est de comprendre comment les professionnels de santé peuvent intégrer les connaissances moléculaires pour faire évoluer leurs prescriptions. Un enjeu capital pour que l’exploration moléculaire soit bel et bien au service d’une médecine personnalisée.


R.D.

1 Le projet de recherche coordonné par le Pr Rouzier a été financé dans le cadre de l’appel à projet « Programme d’Actions Intégrées de Recherche (PAIR), Formes précoces du cancer du sein », lancé conjointement par la Fondation ARC, la Ligue nationale contre le cancer et l’INCa.


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