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15 juin 2022

ASCO 2022 : Retours sur le grand rendez-vous mondial de la cancérologie

Le congrès annuel de la Société américaine d’oncologie clinique a délivré, début juin, des résultats prometteurs qui sont de nature à changer les pratiques des médecins. Voici trois exemples d’avancées qui illustrent comment, pas à pas, on améliore la prise en charge des patients.
 

Cancers du sein métastatiques : une perspective pour les femmes dont la tumeur exprime peu HER2

Le trastuzumab est un anticorps qui reconnait et bloque la protéine HER2, exposée à la surface des cellules et stimulatrice de leur prolifération. Il y a 22 ans, l’arrivée de cette thérapie révolutionnait le traitement des cancers dits « HER2+ », caractérisés par l’expression importante de cette protéine dans la tumeur. Dans l’essai de phase 3 DESTINY-Breast04, des médecins ont évalué l’efficacité de cet anticorps couplé à une molécule de chimiothérapie (le deruxtecan) face à des cancers du sein de stade métastatique et lorsque la tumeur mammaire n’exprime que faiblement la protéine HER2.
De façon remarquable, cet « anticorps conjugué » a permis de stabiliser la maladie plus efficacement que la chimiothérapie seule, le standard actuel pour ces patientes qui ont déjà reçu plusieurs lignes de traitements. Avec le Trastuzumab-deruxtecan, la survie globale s'est élevée à 23,9 mois (versus 17,5 mois) et le délai avant progression de la maladie a doublé (10,1 versus 5,4 mois). 
Les cancers du sein HER2+ représentent 15 à 20 % des cas. Parmi les autres patientes, dont le cancer est aujourd’hui classé « HER2 négatif », on estime qu’environ 60 % expriment peu HER2. En France, ce sont donc des milliers de femmes qui, chaque année, pourraient bénéficier de cette nouvelle thérapie.

 

Cancer colorectal localisé : possibilité d’une désescalade de chimiothérapie grâce à la biopsie liquide.

Chez les patients opérés d’un cancer colorectal localisé, le bénéfice d’une chimiothérapie dite « adjuvante », c’est-à-dire destinée à réduire le risque de récidive après la chirurgie, n’est pas évident. Il faudrait idéalement ne la proposer qu’aux patients à haut risque de récidive mais les critères actuels pour estimer ce risque ne sont pas satisfaisants. Des médecins australiens se sont alors tournés vers la biopsie liquide, une simple prise de sang dans laquelle on recherche de l’ADN provenant de cellules cancéreuses (l’ADN tumoral circulant : ADNtc). Des données préliminaires indiquent en effet que l’absence d’ADNtc détectable est associé à un risque de récidive réduit de 18 fois.
Dans l’essai DYNAMIC de phase 2, mené auprès de 455 patients opérés suite à un diagnostic de cancer colorectal localisé, les médecins ont comparé le taux de récidive entre un groupe de patient pris en charge selon les critères classiques et un autre, dont la prescription de la chimiothérapie était dictée par la présence ou l’absence d’ADNtc dans la biopsie liquide. Après plus de trois ans de suivi, la chimiothérapie avait été administrée à deux fois moins de patients dans le groupe « biopsie liquide » et aucune différence statistique n’était observée entre ce premier groupe et le groupe contrôle.
Ces résultats suggèrent qu’une désescalade pourrait bien être envisagée chez la moitié des patients opérés pour un cancer colorectal localisé sans sur-risque de récidive, grâce à un suivi par biopsie liquide.

 

Anticorps bispécifiques, des outils montants pour l’oncologie de précision

Depuis plusieurs années, les chercheurs mettent au point des anticorps bispécifiques, des protéines thérapeutiques qui favorisent le rapprochement entre deux molécules dont l’interaction produit un effet fatal pour les cellules cancéreuses. Les molécules ciblées par les anticorps bispécifiques sont savamment choisies, sur la base de notre compréhension toujours plus précise des différents mécanismes clés de la biologie des cancers ou de notre système immunitaire.
Cette dernière édition du congrès de l’ASCO a été l’occasion de suivre les progrès de certaines stratégies basées sur l’utilisation de tels anticorps bispécifiques, encore en phases précoces de développement.


L’essai Energy avait ainsi comme objectif de trouver une dose optimale et de déceler les premiers indices d’efficacité d’un anticorps bispécifique ciblant les protéines HER2 et HER3 (le zénocutuzumab). La base théorique du développement de cet anticorps repose sur deux observations : 1° le rapprochement des récepteurs HER2 et HER3, exposés à la surface des cellules cancéreuses, déclenche une cascade de mécanismes moléculaires qui stimulent fortement la prolifération cellulaire ; 2° dans certains rares cas de cancers (notamment du poumon et du pancréas), une anomalie génétique active de façon anormale la protéine NRG1, qui stimule le rapprochement des récepteurs HER2 et HER3. Forts de ces connaissances, les chercheurs ont mis le zénocutuzumab au point pour tuer dans l’œuf les signaux favorisant la prolifération, qui découlent normalement de l’interaction entre HER2 et HER3.
Chez les 83 patients inclus dans l’essai Energy, touchés par des cancers avancés ou métastatiques et porteurs de cette anomalie génétique « NRG1+ », le taux de réponse au zénocutuzumab était de 42% pour les patients atteints de cancer pancréatique et de 35% pour les patients souffrant d’un cancer pulmonaire. Cette réponse durait un peu plus de 9 mois (durée médiane) et n’entrainait que peu d’effets secondaires sévères. Pour les auteurs de l’étude, ces résultats, même précurseurs, pourraient offrir un nouveau standard de traitements aux patients porteurs de l’anomalie NRG1+.


Autre exemple : dans certains cas, les anticorps bispécifiques sont conçus pour faire advenir la rencontre entre les cellules cancéreuses et les cellules immunitaires et, bien-sûr, déclencher la destruction des premières par les secondes ! En la matière, un chercheur d’Atlanta a annoncé la tenue d’un essai de phase 2 qui vise à évaluer le « tarlatamab » auprès de patients atteints d’un cancer du poumon à petites cellules en rechute ou réfractaire aux traitements existants. Cet anticorps bispécifique reconnait à la fois la protéine DLL3, fortement exprimée sur les cellules cancéreuses, et la protéine CD3, activatrice de la réponse immunitaire, exposée à la surface des lymphocytes T.

Anticorps, protéines naturelles ou médicaments.

Les anticorps sont utilisés depuis longtemps en médecine, en oncologie comme dans d’autres spécialités. Ces protéines existent naturellement dans l’organisme, produites par les lymphocytes B de notre système immunitaire. Elles ont la capacité de reconnaitre des motifs moléculaires bien précis, appelés « antigènes », spécifiques d’agents pathogènes, et de faciliter leur capture et/ou la destruction des pathogènes en question. Les anticorps que nous fabriquons en laboratoire permettent, eux-aussi, de reconnaitre des cibles bien précises. Ainsi, les anticorps anti-HER2 reconnaissent ce récepteurs (HER2) qui stimule la croissance de certaines cellules cancéreuses qui l’expriment massivement. A noter que la capacité de mobilisation du système immunitaire n’est pas toujours exploitée, la seule fixation de l’anticorps thérapeutique à sa cible suffisant à en bloquer l’action.


R.D.